
Ça y est ! Vous avez bravé la file d’attente aux caisses des Musées du Vatican, laquelle vous a permit longuement de faire connaissance avec le périmètre de l’imposant mur d’enceinte de la Cité Papale (à moins bien entendu que vous n’ayez réservé sur Viaggio Italia un billet coupe-file!). Votre amour de la peinture vous envoyé directement vers la merveilleuse Pinacothèque Vaticane où, entre une énucléation évitée de justesse face à une perche à selfie et la course de trot entamée entre le groupe au maillot vert et celui des rouges, vous vous êtes pâmés devant Raphaël, Titien, la Déposition de Croix d
e Caravage … Dès lors, à moins d’être passionné d’antiquité étrusque (ce qui n’est pas une mauvaise idée) vous entamez un parcours sinueux et disputé vers les chambres de Raphaël et la Chapelle Sixtine. Mais? Et si vous ralentissiez le pas pour vous attarder quelques longues minutes dans l’une de ces immenses galeries que vous traversez hardiment? En effet, il s’agit là bien plus que de couloirs destinés guider le flot ininterrompu des touristes, alors arrêtons-nous ensemble dans la Galerie des Cartes Géographiques.
Contents
La mémoire géographique de l’Italie du 16ème siècle
Les Musées du Vatican occupent pour l’essentiel deux palais (le Belvédère et le Palais Apostolique) reliés entre eux par le Cortile del Belvedere, un long et complexe bâtiment conçu par l’architecte Bramante au 16ème siècle. Les Galeries Supérieures (Galeries des Candélabres, Galerie des Tapisseries et Galerie des Cartes Géographiques) traversées lors de la visite des Musées du Vatican permettent, au premier étage, de parcourir dans toute sa longueur le Cortile del Belvedere.
La Galerie des Cartes Géographiques est la plus longue des trois, présentant sur 120 mètres de longueur un état exhaustif des connaissances géographiques au 16ème siècle en Italie.
En effet, à travers quarante cartes peintes à même les murs de la galerie (et restaurées en 2016 ) vous allez découvrir toutes les régions d’Italie (incluant Malte et,bien sûr, la Corse et Avignon) avec les routes, les forêts et jusqu’au moindre relief.
Les quarante cartes de la galerie sont l’œuvre du prêtre-dominicain-cartographe-mathématicien-astronome Ignazio Danti qui en avait reçu la commande du Pape Grégoire XIII en 1581, et qui fut accompagné dans cette tache par son frère Antonio.
La plupart de ces cartes régionales est accompagnée d’une vue de la ville principale de la région en question : Turin pour le Piémont, Naples pour la Campanie, La Valette pour Malte, etc.

Vous noterez sans peine que l’orientation des cartes ne répond pas vraiment à nos standards du XXIème siècles : en effet elles sont généralement orientées en direction de Rome et du Vatican, à l’exception de quelques cartes (dont celle de la Corse) où le Nord à juste été placé en bas de la carte (une particularité pour laquelle nous n’avons pas trouvé d’explication convaincante, avis aux spécialistes!).
La vue d’Ancône et de son port

Arrêtons-nous un instant sur les cartes des Marches et notamment sur la représentation d’Ancône, et posons nous la question suivante : comment se fait-il que cette ville, certes très agréable mais tout de même bien loin des grands centres urbains et commerciaux qu’étaient Gènes, Florence, Venise, Rome, Naples ou Milan, soit représentée dans une telle majesté ? Notez la finesse et la précision du décors qui permet d’identifier les principaux bâtiments et monuments de la ville (l’Arc de Trajan, la colline d’Astagno, les principaux palais, etc) ; notez également cet intense trafic de navires marchands alors qu’au 17ème siècle Ancône était assez largement supplantée par d’autres ports italiens sur l’Adriatique.
La réponse à ce qui pourrait apparaître pour une anomalie est finalement très simple… Cette représentation fut réalisée ultérieurement lorsque le décors de la Galerie fut restauré entre 1630 et 1637, par un géographe hollandais, et elle contient des cartouches tout à la gloire du Pape de l’époque, Urbain VIII. Dès lors le sujet du tableau ne pouvait être que majestueux, d’autant plus que la République Maritime d’Ancône avait été, un siècle auparavant, annexée par les États Pontificaux et qu’il était politiquement inconcevable de représenter une ville en déclin !