
Lecce, capitale d’une province des Pouilles et principal centre touristique du Salento (le talon de la botte) est universellement connue pour les chefs-d’œuvre de l’architecture baroque qu’elle abrite et qui lui ont valu le surnom de « Florence Baroque ». Mais c’est une tout autre histoire que nous allons vous conter, une histoire vieille de 2500 ans où se croisent les Messapiens (une des principales colonies de la Grande Grèce), les romains, les templiers, les sœurs Clarisses et le plombier !
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Le jour où Luciano Faggiano c’est penché sur les problèmes d’humidité de sa future pizzeria

En 1984 Luciano Faggiano fait l’acquisition d’une maison située dans le Centre Historique de la belle ville de Lecce, au 56 de la Via Ascanio Grandi, à deux pas de l’une des superbes portes de ville : la Porta San Biagio. Le temps passe et apparaît le projet de faire de ce bâtiment un restaurant, profitant du développement progressif du tourisme dans les Pouilles ; mais auparavant il faudra bien régler ces maudits problèmes d’humidité !
Et c’est ainsi qu’un beau jour de 2001 Luciano et la famille s’attaquent aux canalisations de la maison et entreprennent donc de casser le sol pour voir de quel bois celles-ci sont faites et … une nouvelle vie commença !
La découverte du passé insoupçonné de Lecce

Sous les coups de pioches vigoureux de la famille se dessine quelque chose qu’ils n’analysent pas tout de suite : la roche mère est sculptée, creusée, aménagée, le tout à seulement quelques dizaines de centimètres sous le niveau de la rue. Bien vite il devient clair que ces ouvrages sont à la fois incroyablement anciens et profonds; sous leurs yeux apparaissent des canaux de drainage des eaux de pluie qui sont guidées vers des citernes antiques profondes plus de 4 mètres et, juste à côté, un puits de 12 mètres permet de voir passer la rivière souterraine Idume qui passe sous Lecce pour se jeter à 13 kilomètres dans la Mer Adriatique !
Bien qu’ayant découvert l’origine des problèmes d’humidité de la maison Luciano Faggiano n’est pas au bout de ses surprises ! Ayant compris que sa maison recelait quelque chose d’inédit il fait appel à des universitaires et des associations culturelles de la ville qui concluent à l’origine messapienne de ces ouvrages, c’est à dire qu’ils ont été réalisés par l’une des plus anciennes colonies de la Grande Grèce, issue de colons spartes installés il y a 2500 ans…
Mais, là encore Luciano ne se doute pas que plus il va creuser, gratter, fouiller, avec l’aide de bénévoles et sur ces deniers personnels, évacuant des tonnes de gravats dans sa R4 grise, pendant une durée de 7 ans, sans subvention publique mais avec moultes tracasseries administratives (au point de finir au poste entre deux carabinierii!), plus il va voir apparaître devant lui tous les témoignages des peuplements successifs de Lecce : un embrouillamini architecturalo-historique digne des plus anciens quartiers de Naples.
Une occupation ininterrompue de la Grande Grèce au 21ème siècle

Au delà des ouvrages grecs la maison Faggiano va petit à petit donner les preuves de l’occupation romaine avec des souterrains (qui serviront plus tard à fuir les raids barbaresques dans les terres) dont on pense qu’ils débouchent directement dans l’amphithéâtre de Lecce Piazza Sant’Oronzo !

Suite au grattage des enduits successifs qui recouvrent les murs depuis des siècles vont apparaître une gravure représentant la Fleur de Vie des Templiers ainsi que des fondations démontrant l’agrandissement et l’occupation de la demeure au Moyen-Age; puis le nouvel agencement de la maison démontre qu’elle sera ensuite ni plus ni moins qu’un Couvent de Sœurs Clarisses autour des 15ème et 16ème siècles où apparaissent les cellules des Sœurs, la Chapelle, et un Putridarium où les défuntes étaient invitées à se décomposer avant de rejoindre la fosse commune aménagée au sous-sol !
Les découvertes se poursuivent jusqu’aux toits où on peut désormais escalader jusqu’à la petite Tour de Guet du Monastère.
Le Musée Faggiano est devenu une histoire de famille

Désormais au 56 de la Via Ascanio Grandi trônent fièrement les reproductions des articles de la presse internationale (du New York Times au Monde) qui s’est penchée sur ce musée privé unique en son genre.
Au début peu impliquée Madame Faggiano, désormais veuve, s’occupe pleinement de faire vivre l’héritage de l’acharnement de son époux. Pour peu que soyez attentifs et ouverts elle vous contera toutes les aventures de ce chantiers hors normes avec force gestes qui vous aideront à oublier qu’elle ne parle qu’italien!
Et si vous êtes vraiment curieux demandez donc à Madame Faggiano ce qu’elle pense des découvertes qu’il serait possible de faire dans les caves des immeubles tout autour de son Musée …